29 mai 2016

Arsouille

Cher chauffard, nous avons partagé un bout de bitume, un soir. Il était tard, et votre journée fut sans doute aussi harassante que la mienne. Ce n'était pas une raison pour conduire comme un malotru. Ni pour penser faire la course avec moi, alors que je veux juste me retrouver dans mon salon sans traîner.

Je conduis une bétaillère, un peu ancienne. ça fait plus de vingt-cinq ans que j'ai mon permis. Et je connais ce chemin aussi bien que vous.

Donc, il ne faut pas vous étonner, mais quand j'appuie sur l'accélérateur, ma voiture avance. Vite. Aussi vite que vous l'avez osé avec votre berline presque neuve.

Et puis, vous avez oublié une donnée fondamentale, dans la course que vous meniez.

On conduit plus avec ses yeux et son cerveau qu'avec son pied droit.

Alors, oui, je vous ai séché méchamment dans la bretelle, parce que je sais prendre le virage.

Et je vous ai abandonné, votre majeur brandi de frustration, derrière le gros cul d'un camion pour me faufiler dans la file qui avance.


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